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Le thon que vous mangez n'en est peut-être pas - ICI.Radio-Canada.ca

Des têtes de thon

Le thon est souvent remplacé par de l'escolar, une espèce qui peut causer des vomissements lorsqu'on la mange.

Photo : Reuters / Henry Romero

Radio-Canada

D’après une enquête menée par l’organisme Oceana Canada, les consommateurs canadiens ne devraient pas faire confiance à l’étiquette collée sur leur poisson.

Près de la moitié des échantillons analysés étaient d’une autre espèce que celle annoncée, ou ne respectaient pas les normes d’étiquetage de l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA). Et les techniques pour tromper le consommateur sont nombreuses.

Sur les 472 poissons testés par l’organisme dans six grandes villes canadiennes, 47 % étaient mal identifiés.

Montréal figure parmi les mauvais élèves, avec 61 % de produits mal étiquetés (analysés dans 18 épiceries et 33 restaurants), devant Toronto (59 %), Ottawa (46 %) et Vancouver (26 %). Victoria mène la danse de ce classement peu glorieux avec 67 % d'étiquettes erronées.

Les conséquences d’un mauvais étiquetage peuvent être sérieuses.

Ainsi, 16 % des échantillons mal identifiés à Montréal pouvaient entraîner de graves conséquences, selon l’organisme.

Le tableau est plus sombre dans les restaurants de la métropole : près des trois quarts des échantillons y étaient frauduleux, contre 34 % dans les épiceries.

Un éventail de techniques pour duper l’acheteur

Les manières de berner les consommateurs sont variées, explique Oceana Canada.

Par exemple, des poissons interdits dans plusieurs pays sont vendus au Canada sous de faux noms. Ce qui fait que les consommateurs peuvent être exposés à des parasites, des allergènes et des pesticides, ou des toxines naturellement présentes dans certaines espèces.

Le thon est couramment remplacé par l’escolar, une espèce qui peut causer diarrhées et vomissements, qui est interdite à la vente au Japon et déconseillée par Santé Canada pour les femmes enceintes.

La sériole du Japon, qui tient lieu de limande à queue jaune, peut, elle, causer des symptômes neurologiques débilitants à long terme d’après l’organisme Oceana.

D’autres stratagèmes existent aussi pour les vendeurs. L’étiquette annonce par exemple que le poisson vendu est sauvage, alors qu’il est en fait un produit de l’élevage : c’est le cas du saumon d’élevage de l’Atlantique (34,95 $ au kilo), devenu sur les étals un saumon sauvage du Pacifique (78,93 $ au kilo).

Certains poissons bon marché peuvent aussi être vendus comme des poissons d’une espèce qui coûte plus cher. La dorade (19,95 $ au kilo) se transforme, une fois sur la glace des poissonneries, en bar rayé commun (75,29 $ au kilo).

Selon Sayara Thurston, responsable des communications pour Oceana Canada, le poisson a une chaîne d’approvisionnement assez longue et plus complexe que d’autres produits, ce qui favorise ce type de fraude.

Ottawa à la remorque

La coupe est pleine pour l’organisme Oceana :Nous avons […] découvert des problèmes endémiques quant aux normes de traçabilité et d’étiquetage des produits de la mer.

L’organisme sonne l’alerte pour qu’Ottawa agisse.

Il souhaite que les produits de la mer soient mieux suivis, avec un système de traçabilité harmonisé au niveau fédéral, pour que l'étiquette puisse répondre aux questions qui, quoi, où, quand et comment la prise a été capturée.

Oceana veut aussi mettre en place des tests d’ADN dans les programmes d’authentification de l’Agence Canadienne d'inspection des aliments (ACIA).

En ce moment au Canada, les standards pour l’étiquetage sont assez mêlants. Des douzaines d’espèces peuvent être étiquetées comme étant du thon ou de la sole.

Sayara Thurston.

Que faire alors pour le consommateur qui veut continuer d’acheter du poisson au Canada, en attendant une évolution des normes? Il faut poser le plus de questions possible [au poissonnier]. Il faut acheter local et de saison. […] indique Sayara Thurston. Selon elle, les labels et certifications peuvent aider l'acheteur mais ne remplacent pas un programme fédéral de suivi du produit.

L'étiquette présente peu d'information, à part le prix et la date de consommation.

Au Canada, le lieu et date de capture n'apparaissent pas sur l'étiquette.

Photo : Oceana Canada

L’UE, poisson-pilote du suivi de produit

On retrouve le lieu, le prix, le nom scientifique également sur l'étiquette.

Dans l'Union européenne, le type de pêche, le nom de l'entreprise qui a réalisé la prise et l'endroit sont indiqués sur l'étiquette.

Photo : Oceana Canada

D’après le rapport, le Canada ferait bien de suivre l’exemple de l’Union européenne (UE).

Le plus grand importateur de fruits de mer au monde est, selon lui, le chef de file en matière de traçabilité et d’étiquetage.

Le nom scientifique de l’espèce, le navire, le lieu et la date de capture, la méthode et l’engin utilisé pour la pêche suivent le produit tout au long de la chaîne d’approvisionnement, dans l’UE.

En resserrant ses normes de traçabilité des poissons, la fraude et l’étiquetage trompeur sont passés de 23 % à 7 % entre 2011 et 2014.

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