Les libéraux fédéraux de Justin Trudeau ont trouvé un moyen de calmer la grogne qu’ils sont susceptibles de rencontrer sur leur chemin électoral dans certaines provinces-clé menées par des gouvernements conservateurs farouchement opposés à la tarification du carbone : des retours d’impôt. Ottawa entend rembourser dès le printemps 2019 les citoyens qui se verront imposer la taxe fédérale parce que leur province aura refusé d’agir.
Les montants versés, pour une famille moyenne de quatre personnes, atteindront 256 $ au Nouveau-Brunswick, 307 $ en Ontario, 340 $ au Manitoba et 609 $ en Saskatchewan. Trois de ces quatre provinces sont dirigées par un gouvernement conservateur et la quatrième, le Nouveau-Brunswick, pourrait l’être sous peu puisque les libéraux sont sur le point de perdre le pouvoir dans un contexte minoritaire.
Les montants retournés aux citoyens seront calculés à même leur rapport d’impôt et inclus dans les remboursements auxquels ils ont droit ou appliqués contre leur dû, le cas échéant. Les fonctionnaires estiment que 57 % des citoyens de ces provinces reçoivent des retours d’impôt. Ceux-ci seront donc plus généreux. Le montant versé au printemps 2019 constituera une avance puisque ce n’est qu’à compter du 1er avril 2019 que le tarif fédéral commencera à s’appliquer.
Si les chèques varient d’une province à l’autre, c’est parce que les niveaux de consommation de combustible varient. Les Saskatchewanais sont les grands champions en la matière parce qu’ils conduisent de plus gros véhicules et que le gaz naturel est très abordable, ont expliqué les fonctionnaires fédéraux lors d’une séance d’information.
Ottawa avait demandé aux provinces de se doter d'une formule maison pour imposer un prix aux émissions de gaz à effet de serre (GES). Trois l'ont fait (Colombie-Britannique, Alberta, Québec) et trois sont sur le point de le faire (Nouvelle-Écosse, Terre-Neuve et Île-du-Prince-Édouard). Ces provinces gèrent déjà les recettes de leur tarification, comme le Québec avec son Fonds vert. Leurs citoyens ne recevront donc pas d'argent d'Ottawa.
Aux récalcitrantes, Ottawa impose sa propre recette comprenant deux volets: une redevance sur les combustibles fossiles (4,42 cents le litre d'essence et 3,91 cents par mètre cube de gaz naturel en 2019) et des plafonds d'émissions de GES pour les grands émetteurs industriels (cimenterie, mines, producteurs d'engrais et de produits chimiques, etc.).
Pour chaque catégorie de grands émetteurs, Ottawa calcule la moyenne d’émission de GES et fixe le plafond à 80 % de ce chiffre. Toute entreprise émettant au-delà de ce plafond doit soit payer à Ottawa une taxe, soit acheter auprès d’entreprises plus propres des crédits d’émission. C’est le principe des bourses du carbone.
La Saskatchewan conteste devant les tribunaux le droit d’Ottawa de lui imposer son plan. À la suite de l’élection de Doug Ford, l’Ontario a emboîté le pas. Le Manitoba a récemment changé d’avis et abandonné son plan provincial de tarification. Quant au plan du Nouveau-Brunswick, il n’a pas été jugé suffisant par le fédéral. Ottawa exige un prix de 20 $ la tonne d’émission de GES en 2019, augmentant de 10 $ la tonne chaque année pour atteindre 50 $ en 2022. Le gouvernement de Justin Trudeau a promis que l’argent récolté dans chaque province y serait retourné. C’est cette façon de retourner l’argent qui a été dévoilé mardi.
Les recettes provenant de la redevance sur les combustibles (1,77 milliard de dollars en Ontario la première année, 310 millions $ en Saskatchewan, 190 millions $ au Manitoba et 90 millions au Nouveau-Brunswick) seront retournées à 90 % aux citoyens via le rapport d’impôt. La balance de 10 % sera destinée à un fonds que pourront utiliser les municipalités, les hôpitaux, les écoles, les petites entreprises, les organismes à but non lucratif et les communautés autochtones pour financer des projets d’efficacité énergétique. Les modalités de ce programme seront dévoilées plus tard.
L’argent récolté auprès des grands émetteurs industriels, lui, sera mis à la disposition de ces grands émetteurs pour financer de nouvelles technologies vertes. Le montant récolté anticipé n’est pas encore connu ni les modalités de retour.
Ottawa estime que les citoyens recevront en moyenne un plus gros remboursement que ce qu’ils auront payé en tarification du carbone. La raison est simple : tout le monde recevra le même remboursement indépendamment de ce qu’ils auront déboursé en réalité.
Comme la classe moyenne achète moins de produits fossiles que les contribuables plus riches parce qu’elle possède moins de véhicules énergivores, chauffe de moins grandes demeures et utilise moins l’avion, elle se retrouvera gagnante. Les riches contribuables seront les perdants.
Par ailleurs, Ottawa estime maintenant que son plan permettra de réduire de 50 à 60 mégatonnes les émissions de GES du Canada d’ici 2022. Sa précédente estimation parlait plutôt de 80 à 90 MT. La différence, ont expliqué les fonctionnaires, vient du retrait de l’Ontario de la bourse du carbone internationale. C’est donc dire que le mécanisme fédéral est moins contraignant que celui auquel s’astreignait la province de Doug Ford.
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