La loi modifiant les tarifs d’électricité sera adoptée sous bâillon et enrichira Hydro-Québec au détriment des consommateurs, dénoncent les partis d’opposition. Les arguments de la CAQ reposent sur des faussetés, disent-ils.
«On a un gouvernement qui fait exactement le contraire de ce qu’il a dit. C’est juste de la “bullshit” quand il a dit aux Québécois : On va vous rembourser 1,5 milliard, puis qu’en bout de ligne il rehausse les tarifs, et qu’il en profite pour modifier, de façon substantielle, une institution indépendante», a critiqué le député péquiste Sylvain Gaudreault.
Le projet de loi 34, qui fait l’objet d’un bâillon parlementaire aujourd’hui, gèle les tarifs d’électricité pour l’année 2020 puis les fixe à l’inflation par la suite. Il redonne également 500 M$ aux consommateurs résidentiels, commerciaux et industriels sur la première facture de l’année 2020.
Le gouvernement prétend que cette pièce législative va régler pour de bon la question des trop-perçus.
560 M$ de plus à payer
Les organismes de défenses des consommateurs croient plutôt qu’Hydro-Québec va faire plus de profits. Les grandes entreprises comme ArcelorMittal, Alcoa, Rio Tinto ou Lassonde, par exemple, calculent que le projet de loi 560 M$ de plus sur cinq ans. « Les industriels savent compter », a dit Jocelyn B. Allard, président de ce lobby.
Pour Sylvain Gaudreault, justement, le projet de loi a été écrit par Hydro-Québec. Le monopole « se lève la nuit pour haïr la Régie de l’Énergie » puisque l’organisme indépendant bloque son « appétit gargantuesque ». Il estime que le ministre de l’Énergie Jonatan Julien est « un pauvre type qu’on a roulé dans la farine » et que le premier ministre François Legault rêve depuis longtemps de prendre le contrôle des tarifs d’électricité.
Perte pour les consommateurs
Le chef libéral Pierre Arcand, un ancien ministre de l’Énergie qui connait bien les réflexes d’Hydro-Québec, soutient que la pièce législative est « un cadeau pour Hydro-Québec et une perte considérable pour les consommateurs parce que ce sont eux qui vont payer plus cher leur électricité ». Il croit que le gouvernement caquiste a « besoin de cet argent-là pour financer, évidemment, ses nombreuses promesses électorales ».
Chez Québec solidaire, l’élue Ruba Ghazal a énuméré une longue liste de groupes qui s’opposent au projet de loi. Option consommateur, l’Association québécoise des consommateurs industriels, l’Association québécoise de lutte contre la population atmosphérique, l’IRIS, un institut de recherche de gauche, la Fédération canadienne des entreprises indépendantes, l’association de l’aluminium du Canada, le groupe de défense des aînés FADOQ, une série d’experts comme Jean-François Blain, Jean-Thomas Bernard, Normand Mousseau, Pierre-Olivier Pineau, ainsi que d’anciens ministres de l’Énergie comme Guy Chevrette et Pierre Moreau. « La CAQ est sur une pente dangereuse. Elle a une majorité parlementaire, pas une majorité sociale », a dénoncé Mme Ghazal.
Le gouvernement gouverne
François Legault estime de son côté qu’il a l’appui des Québécois. « Les oppositions s’opposent. Le gouvernement prend des décisions et est jugé au bout de 4 ans sur ses décisions », a-t-il dit.
Il rejette du revers de la main l’analyse des groupes de défenses des consommateurs. Il est impossible selon lui de prévoir les hausses futures des dépenses d’Hydro-Québec, sur laquelle sont basées les hausses de tarifs dans le régime actuel.
Quant au bâillon parlementaire, il était rendu nécessaire en raison du travail de sape de l’opposition, dit M. Legault. « C’est combien de temps la démocratie ? 1000 heures ? 2000 heures ? Moi je pense qu’après 100 heures, les gens autour de la table ont dit ce qu’ils avaient à dire. Après 100 heures, il est temps qu’on passe au vote », a laissé tomber le premier ministre.
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