(Québec) « Houston ! Nous avons un problème ! » Bien des libéraux québécois ont dû se souvenir de la réplique culte du film Apollo 13 quand ils ont franchi la porte du resto-bar Houston, au centre-ville de Montréal, il y a deux semaines. Après la dégelée d’il y a un an, des libéraux de longue date tentent de recréer ce qui animait le Parti libéral du Québec (PLQ), qui avait régné presque sans partage à Québec au cours des 16 dernières années.
Car pour l’heure, il y a loin de la coupe aux lèvres. L’événement privé, organisé par une permanente perpétuelle au PLQ, Pascale Duval, était bien davantage qu’un cocktail de vieux compagnons d’armes. Deux anciens premiers ministres s’y trouvaient : Daniel Johnson et Jean Charest. Les gens faisaient la file pour échanger quelques minutes avec ce dernier. Par un courriel aux participants, Philippe Couillard s’est excusé de son absence ; il était à l’étranger.
Grand bien lui fasse, parce que bien des militants ne cachent plus leur amertume devant les stratégies du dernier régime libéral. L’ambiance décontractée aidant, on parlait ouvertement du « dégât » de la période Couillard, quand le chef du parti et sa garde rapprochée faisaient bien peu de cas du caucus des députés, de la permanence du parti et, surtout, des militants de la base. Bien des gens s’étaient trouvés « tassés » par de nouveaux arrivants à la dernière bataille électorale – Alexandre Taillefer et Hugo Delorme –, avec les résultats que l’on sait.
Ils pensent encore que c’est la population qui n’a pas compris, alors qu’ils ont déconnecté le parti de la majorité francophone.
Un des invités de l’événement
La Presse a joint une demi-douzaine d’élus, d’ex-élus et d’apparatchiks libéraux présents au « conventum ». Le chef de cabinet de M. Couillard, Jean-Louis Dufresne, était présent, tout comme l’ex-ministre et conseiller important Jean-Marc Fournier.
Rencontre au sommet
Parmi les 250 personnes, il y avait suffisamment de monde pour reconstituer bien des cabinets libéraux, ceux de l’an dernier jusqu’aux escouades de l’époque de Robert Bourassa. S’y trouvaient les organisateurs Jean Masson, Pierre Bibeau et son fils Alexandre, Benoît Savard, Luc Archambault, Joël Gauthier, ex-directeur général du parti, ainsi qu’un vétéran, Jean-Marc Bard. Également Sylvain Langis et Josée Lévesque, qui étaient aux premières loges lors de la campagne de 2018.
Des employés politiques de longue date qui ont traversé les régimes : Claude Lemieux, Ronald Poupart, François Crête, Michel Rochette, Hélène Ménard, Richard Mimeau, Nicolas Perrino, Daniel Desharnais. Des employés actuels : Christian Therrien, Sébastien Lachaîne et la directrice du parti, Véronyque Tremblay. Et surtout une longue liste d’anciens ministres et députés – de Martin Coiteux à Raymond Bachand, sans oublier David Whissell, Line Beauchamp, Geoffrey Kelley, Christos Sirros, Jacques Chagnon et Jean D’Amour.
Des rescapés du 1er octobre 2018 aussi : Dominique Anglade, toujours à la recherche d’appuis pour sa course à la direction, Marwah Rizqy, Isabelle Melançon, Marc Tanguay et Gregory Kelley étaient du groupe. Étaient aussi présents Filomena Rotiroti, Enrico Ciccone, Carlos Leitão, Nicole Ménard et, bien sûr, le chef intérimaire Pierre Arcand.
Quelques impressions générales se dégageaient des conversations. Les employés politiques du parti tiennent déjà pour acquis que Mme Anglade deviendra chef du PLQ dès février, puisqu’elle n’aura pas d’adversaire. Beaucoup de libéraux croient également que la Coalition avenir Québec (CAQ), à moins d’un événement imprévisible, sera au pouvoir pour deux mandats – donc que les élections de 2022 rééliront François Legault.
Le prochain chef libéral pourrait bien être un leader de transition, qui devra céder sa place à un visage nouveau pour le test suivant – un scénario dont parle d’ailleurs ouvertement l’ancien ministre Jacques Dupuis à l’émission Les mordus à RDI. M. Dupuis n’était pas au Houston.
Un autre constat, une autre déception pour les libéraux : l’élection partielle qui sera déclenchée cette semaine pour la circonscription de Jean-Talon n’augure rien de bon pour la candidate libérale Gertrude Bourdon. La circonscription a de tout temps été libérale, mais parmi les convives, une prédiction circulait : le PLQ pourra s’estimer heureux s’il ne termine pas en troisième position, derrière la CAQ et Québec solidaire.
Étrangement, plusieurs participants ont quitté l’événement plutôt rassurés. Bien sûr, le PLQ peine à prendre acte de la défaite.
La désorganisation est évidente ; plus de 30 circonscriptions n’ont pas même d’association locale. Mais beaucoup n’ont pas pour autant baissé les bras.
Dans l’équipée d’Apollo 13 – il y aura 50 ans en 2020 –, le chef de mission au sol, Gene Kranz, avait aussi frappé l’imaginaire collectif avec sa réplique « failure is not an option » (l’échec n’est pas une option). À la permanence du PLQ, rue Saint-Denis, on avait placardé cette maxime il y a 20 ans.
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