Le député Erin Weir aurait pu rester membre du caucus du NPD, mais il a commis l’erreur de dénoncer publiquement les allégations de harcèlement pesant contre lui depuis des semaines. Cet acte d’insubordination a convaincu son chef, Jagmeet Singh, de l’expulser.
« Il a contesté les résultats de l’enquête, a déploré M. Singh en français. Il s’est attaqué à la plaignante et il a aussi dévoilé des détails qui peuvent identifier la personne qui a déposé la plainte. À cause de cela, je ne peux pas avoir confiance dans sa capacité de réhabilitation, à cause de ses actions qui montrent qu’il n’accepte pas la responsabilité. »
Erin Weir est dans les limbes politiques depuis le 1er février. Alors qu’il tentait de devenir président du caucus, sa collègue Christine Moore s’y est opposée. « Il y a trop de femmes (principalement des employées) qui m’ont confié que tu les harcelais. En tant que femme, je ne me sentirais pas à l’aise de te rencontrer seule », avait-elle écrit dans un courriel destiné à toute la députation néo-démocrate. Elle-même ne se disait pas victime de son comportement. Jagmeet Singh avait demandé à une enquêteuse indépendante de faire la lumière sur les événements et avait dans l’intermède relevé le député de ses fonctions parlementaires.
M. Singh a reçu le rapport de l’enquêteuse il y a deux semaines, mais n’avait toujours pas indiqué ce qu’il adviendrait de son député ou ce qui lui avait été reproché exactement. Une fuite de la CBC a fait état d’une femme soutenant que M. Weir s’était adressé à elle de manière si agressive qu’elle en était venue à craindre pour sa sécurité physique. En lisant ce reportage, M. Weir est sorti publiquement pour raconter sa version des faits.
Selon lui, la plaignante était une employée du bureau du chef de l’époque Thomas Mulcair. Il participait au congrès du NPD de Saskatchewan et voulait prendre la parole au micro au sujet de l’imposition d’une taxe sur le carbone aux importations. Cette personne l’aurait intercepté pour l’empêcher de parler pour ne pas mettre le parti fédéral dans l’embarras. « En d’autres mots, avait écrit M. Weir lundi dans une déclaration, la plainte ne découle pas du fait que M. Weir a exercé son autorité sur une employée, mais du fait qu’une employée de l’ancien chef fédéral exerçait son autorité pour étouffer un débat qu’ils [l’entourage du chef] jugeaient controversé. »
Il semble que ce soit cette sortie qui ait valu à M. Weir son expulsion. C’est d’ailleurs ce qu’il allègue dans sa déclaration publiée jeudi. Il estime la punition trop sévère. « L’expulsion est une punition beaucoup plus dure que celle appliquée à plusieurs autres députés néodémocrates qui ont, à l’occasion, commenté publiquement [un sujet] sans l’autorisation explicite du chef. »
Sur le fond, on ne sait pas ce qu’aurait fait M. Weir. Le chef Jagmeet Singh a refusé de le dévoiler au nom de la « confidentialité ». Mais dans sa déclaration, le chef indique qu’il y a eu quatre allégations : une de harcèlement (lors du congrès de Saskatchewan) et trois de harcèlement sexuel. À propos des allégations à caractère sexuel, le chef Jagmeet Singh s’est limité à raconter que « M. Weir n’a pas su lire les signaux non verbaux dans des situations sociales et son comportement a entraîné des conséquences néfastes considérables pour les personnes ayant formulé des plaintes. Le rapport [de l’enquêteuse] montre que lorsqu’il s’est fait dire que ses avances n’étaient pas désirées, M. Weir s’est arrêté ».
Dans sa déclaration, M. Weir est plus précis, bien qu’il souligne ne pas connaître l’identité des personnes qui l’accusent. On lui a dit « qu’il s’assoyait ou se tenait probablement trop près de gens lors d’événements sociaux et qu’il engageait la conversation plus longtemps que ces gens ne le désiraient ». « Avant cette enquête, écrit M. Weir, je n’avais aucune idée que j’avais fait des choses non désirées. Quand je lis le sommaire des plaintes, il m’est apparu clair que je suis parfois lent à saisir les indices sociaux. » Il s’excuse auprès de ses victimes. Il était prêt à suivre une formation particulière pour s’améliorer sur le plan social, mais sa sortie publique et son expulsion ont coupé court à ce plan.
De manière générale, M. Weir se plaint du processus, parce que le parti a, soutient-il, cherché pour trouver des plaintes à son endroit. Il soutient que le chef de cabinet de M. Singh a envoyé un courriel à 250 employés du NPD pour les inviter à dénoncer tout comportement déplacé passé de M. Weir. Selon M. Weir, qui parle de lui à la troisième personne dans ses communiqués, « cette combinaison de déclarations publiques, de couverture médiatique et de communications internes à propos d’une enquête pour harcèlement, alors que M. Singh a dit qu’il croit les survivants, a amené les gens à réinterpréter a posteiori leurs interactions avec M. Weir à travers ce prisme ».
Selon M. Weir, l’enquêteuse aurait conclu que les incidents à l’origine des plaintes « tombent dans la catégorie des cas moins sérieux ».
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